Le gouvernement avait annoncé une initiative législative visant à assouplir les conditions de transfert (de création) de la compétence GEMAPI. C’est apparemment le sens de la PPL relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations déposée mardi 17/10 par le groupe MODEM de l’Assemblée nationale, dont le Président, Marc FESNEAU, est l’ancien assistant parlementaire de J. GOURAULT, Ministre en charge des collectivités locales. Cette PPL a été renvoyée à la Commission des Lois mais n’est pour l’instant pas inscrite à l’agenda. Il est cependant probable qu’elle le soit rapidement compte tenu du soutien du gouvernement dont elle bénéficie. Il est également probable que les éléments de cette PPL fassent l’objet de discussions dans le cadre des ateliers de la deuxième conférence nationale des territoires prévue le 14 décembre prochain.
La FNCCR est très mobilisée sur ce sujet et souhaite recueillir vos avis sur les termes et objectifs de cette PPL afin de préparer des propositions d’amendements et de définir, avec votre soutien, les modalités de leur portage.
- Article 1 : permettre aux départements engagés dans des missions GEMAPI avant le 1er janvier 2018 de continuer à intervenir au-delà de 2020 [modification de l’art. 59 loi MAPTAM]; Cette disposition appelle plusieurs remarques de la FNCCR :
- Les départements ont une vocation en matière de solidarité territoriale qui trouve à s’exprimer pour l’exercice de la compétence notamment en littoral ou en rives de grands fleuves, ils sont nombreux à s’y être investi (animation, expertise, maîtrise d’ouvrage, financement). Leur permettre de continuer à intervenir en matière de Gemapi répond en ce sens à de nombreuses attentes exprimées par les collectivités du territoire.
- Toutefois, l’article est rédigé de telle façon que les départements continueront d’intervenir sur des missions ou des parties de missions relevant de la Gemapi, ce qui va au-delà du seul financement. La question qui en découle porte sur l’articulation de cette intervention avec l’exercice de plein droit des EPCI-FP : les missions exercées par les départements s’entendent-elles alors sur les territoires, ouvrages, systèmes d’endiguement ou cours d’eau (etc.) concernés en substitution des communes et donc EPCI-FP qui le composent?, ou en complément de l’action des EPCI (et dans ce cas avec quelle articulation /coordination) ?
- Estimez-vous utile de proposer des amendements pour clarifier cette répartition ou les procédures permettant d’établir localement de cette répartition (ou articulation/ coopération) ?
- Pensez-vous utile de proposer un amendement ouvrant la possibilité de financement du département aux projets menés en matière de Gemapi et dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par des syndicats mixtes (via article L1111-10 du CGCT, qui réserve actuellement cette possibilité aux seuls communes et leurs groupements) ?
- En outre, en l’état actuel de la législation, un syndicat mixte ouvert ne peut adhérer à un autre Syndicat Mixte Ouvert : un département ne pourra donc pas adhérer à un EPAGE (ou un syndicat de droit commun) et à un EPTB, même lorsque l’EPAGE (ou le syndicat) est adhérent de l’EPTB. De même, il n’est pas clairement prévu qu’un département puisse adhérer à un syndicat mixte ouvert uniquement pour une partie de son territoire. Pensez-vous qu’il serait pertinent de proposer des amendements visant
- à permettre l’adhésion d’un syndicat mixte ouvert à un autre syndicat mixte ouvert ?
- ce qui permettrait l’adhésion d’un département à un EPAGE (ou un syndicat mixte de droit commun) et à un EPTB (sous réserve qu’il n’y ait pas de superposition des compétences transférées par le département)
- ou l’adhésion d’un département à plusieurs EPTB ou EPAGE sur différentes parties de son territoire ?
- à étendre ce principe dérogatoire à toutes les compétences en lien avec la gestion de l’eau ?
- à permettre l’adhésion d’un syndicat mixte ouvert à un autre syndicat mixte ouvert ?
De limiter la responsabilité des EPCI-FP, jusqu’au 31/12/2019, à la seule obligation d’organiser la compétence GEMAPI à la suite de son transfert au 1er janvier 2018 [modification de l’art. 59 loi MAPTAM]. Il s’agit notamment d’exonérer les EPCI-FP nouvellement compétents en GEMAPI au 1er janvier 2018, de la responsabilité portée par le gestionnaire d’ouvrages de protection contre le risque inondation jusqu’au 31 décembre 2019.
Pour mémoire, l’article L. 562-8-1 du code de l’environnement prévoit déjà que la délivrance de l’autorisation administrative exonère de sa responsabilité le gestionnaire de l’ouvrage ou du système d’endiguement (les dossiers sont à déposer par le gestionnaire avant 2019 ou 2021 selon la classe des ouvrages, en vertu du décret du 12 mai 2015). La PPL étendrait cette disposition jusqu’au 31 décembre 2019, à tous les systèmes d’endiguement (et aménagements hydrauliques) des EPCI-FP compétents, même si leurs ouvrages ne sont pas encore régularisés.
Mais telle que rédigée, les syndicats (qu’ils soient de droit commun ou reconnus EPTB ou EPAGE) ne bénéficieraient pas de l’exonération, de même que les EPCI-FP qui se seraient saisis de la compétence de manière anticipée.
Ne faut-il proposer une exonération de responsabilité de principe pour toutes les collectivités (EPCI et SM), jusqu’à la date de délivrance de l’autorisation, sous réserve du respect des dates limites de régularisation fixées par décret (2019 à 2021 selon la classe des ouvrages) ?
NB : il ne faudrait pas que cette disposition conduise à démobiliser ces collectivités, durant les années 2018 et 2019, sur la question des ouvrages (notamment parce que les ouvrages de protection contre le risque d’inondation appartenant à des personnes morales de droit public leur seront mis à disposition de droit au 1er janvier 2018). Néanmoins, dans les faits, tant que les questions de gouvernance du territoire ne sont pas réglées la régularisation administrative des ouvrages est très généralement reportée.
- Article 2 : le Gouvernement aurait à remettre un rapport d’évaluation au Parlement concernant les conséquences du transfert de la compétence GEMAPI aux communes et EPCI-FP pour la gestion des fleuves. Le rapport devrait notamment étudier les évolutions institutionnelles et financières possibles de cette gestion, et finalement reconnaitre la nature nationale de l’enjeu de la gestion des fleuves.
- Article 3 : Il s’agit de sécuriser la sécabilité des « item » de la GEMAPI en vue de transferts partiels de ces « item » (tout ou partie du 1°, du 2°, du 5° ou du 8° du L211-7 du code de l’environnement), sur toute ou partie du territoire par les EPCI-FP à des syndicats (mixtes) [modification de l’art L.5211-61 CGCT]
La sécabilité à l’intérieur des « items » de la GEMAPI, que la DGCL et la DGPR considèrent interdite aujourd’hui, est très attendue par de nombreux acteurs – dont la FNCCR. Elle permettrait notamment de dissocier, au sein du 5°, la « défense contre les inondations » de la « défense contre la mer », et /ou la surveillance de l’hydrologie des cours d’eau des actions opérationnelles, et de dissocier au sein du 2°, certains plans d’eau des obligations d’entretien de la collectivité (en l’absence de définition claire de ce qu’est un plan d’eau), etc..
MAIS ATTENTION : la rédaction proposée conduirait à restreindre la possibilité de transfert de compétence des EPCI-FP à un syndicat mixte sur une partie seulement de leur territoire : passage de « gestion de l’eau et des cours d’eau » (rédaction actuelle) à «gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations » (c’est-à-dire de GEMAPI) – étant entendu que cette possibilité partielle sur une base géographique demeurerait possible en matière de alimentation en eau potable, d’assainissement collectif ou non collectif, de collecte ou de traitement des déchets ménagers et assimilés, ou de distribution d’électricité ou de gaz naturel . Il ne serait ainsi plus possible pour un EPCI-FP ayant pris (à titre facultatif) des compétences relevant des items « non-GEMAPI » (hors assainissement et eau potable) de l’article L.211-7 du Code de l’environnement, de les transférer à un syndicat mixte sur une partie de son territoire, alors même que le syndicat ne couvre qu’une partie de l’EPCI-FP et que ses statuts comprennent nombre d’entre elles, pour répondre de manière intelligible aux enjeux locaux:
4° La maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement ou la lutte contre l’érosion des sols » ;
7° La protection et la conservation des eaux superficielles et souterraines »
9° Les aménagements hydrauliques concourant à la sécurité civile ;
10° L’exploitation, l’entretien et l’aménagement d’ouvrages hydrauliques existants ;
11° La mise en place et l’exploitation de dispositifs de surveillance de la ressource en eau et des milieux aquatiques ;
12° L’animation et la concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques dans un sous-bassin ou un groupement de sous-bassins, ou dans un système aquifère, correspondant à une unité hydrographique.
La FNCCR doit-elle proposer d’étendre la faculté de sécabilité fonctionnelle et géographique à l’ensemble des missions figurant à l’article L211-7 du code de l’environnement (dont la GEMAPI et l’ensemble des autres missions) ?
- Article 4 : étend le principe de sécabilité fonctionnelle (au sein des différents items de la GEMAPI) aux EPTB et EPAGE, par transfert ou délégation.
- Article 5 : Il s’agit d’inclure dans le 12° de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, la prévention des inondations et ainsi couvrir l’ensemble des enjeux : « L’animation et la concertation dans les domaines de la prévention du risque d’inondation, de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques ». Cela permet aux entités exerçant ce 12° (notamment les syndicats, EPAGE ou EPTB) d’être les porteurs légitimes des PAPI, contrats territoriaux etc…
- Article 6 : L’article modifie l’article L. 3232-1-1 pour intégrer l’ensemble des missions GEMAPI dans les domaines de l’assistance technique dite « de solidarité » des départements qui en matière de GEMAPI n’est aujourd’hui possible que pour « la restauration et de l’entretien des milieux aquatiques ». NB : Un projet de décret modificatif portant sur les critères d’éligibilité et le contenu des missions d’assistance concernées n’est toujours pas publié.
- Article 7 modifie l’article L333-1 du code de l’environnement afin d’associer par voie de consultation, les parcs naturels régionaux à l’élaboration ou la révision de documents de planification et d’aménagement en ce qui concerne la gestion des milieux aquatiques et zones humides de leur territoire
Nous vous remercions de nous faire part, en retour, de vos commentaires et avis sur les premières modifications que la FNCCR se propose de soutenir ; nous sommes également très attentifs au soutien que vos élus, notamment des parlementaires, pourraient nous apporter.