Adoption de la PPL transfert de compétence eau et assainissement aux CC

Après un long marathon législatif, la LOI n° 2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes a été publiée le 05 août dernier. Voici les diverses dispositions qui en résultent :

Communautés de communes :

  • Le principe du transfert obligatoire au 1er janvier 2020 des compétences Eau et assainissement des eaux usées est maintenu, mais pour les communautés de communes qui n’exercent pas déjà à la date de publication de cette loi, respectivement toute ou partie de la compétence eau, ou toute ou partie des missions relatives au service public de l’assainissement collectif, le transfert obligatoire peut être reporté au 1er janvier 2026 si au moins 25 % des communes membres de la CC représentant au moins 20 % de la population totale de la CC délibèrent avant le 1er juillet 2019, pour s’opposer respectivement au transfert de la compétence Eau ou à celui de la compétence assainissement. Les CC qui n’exercent que les missions relatives au service public de l’ANC ne seront donc pas obligées de prendre l’intégralité de la compétence assainissement des eaux usées dès le 1er janvier 2020 (en cas d’opposition des communes membres).

à Ainsi, sur les 1 009 CC recensées au 1er janvier 2018, sont donc concernées par la possibilité de reporter les prises de compétences obligatoires :

  • Pour l’eau potable : 758 CC
  • Pour l’assainissement dans son intégralité : les 288 CC qui n’exercent aucune compétence dans l’assainissement des eaux usées et les 346 CC qui n’exercent que les missions ANC
    (précisons que dans ce dernier cas, l’exercice des seules missions ANC ne permettra pas à la CC de la comptabiliser dans les compétences permettant de bénéficier de la DGF bonifiée).

En revanche, les 35 CC qui n’exercent actuellement que la composante « assainissement collectif » devront obligatoirement (et automatiquement) prendre la compétence assainissement (donc en plus l’ANC) au 1er janvier 2020.  

  • La compétence obligatoire (en 2020 au plus tard 2026) des communautés de communes en matière d’assainissement est désormais explicitement limitée aux missions relatives au service public de l’assainissement des eaux usées (« assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L.2224-8 du CGCT»).
    La gestion des eaux pluviales urbaines (au sens de l’article L.2226-1) demeure une compétence des communes (transférable à la CC à titre facultatif).

à La prise de compétence « assainissement (des eaux usées) » par une CC n’emporte donc plus automatiquement et obligatoirement la prise de compétence « gestion des eaux pluviales urbaines » comme le soutenait la DGCL dans ses notes d’information des 13 juillet 2016 et 18 septembre 2017.

  • Le principe de la représentation-substitution « intégrale » est rétabli pour les compétences eau et assainissement (suppression de la condition du seuil de 3 EPCI à fiscalité propre et plus de possibilité pour les CC de demander au préfet, après avis de la CDCI, de se retirer du syndicat avant le 1er janvier suivant la prise de compétence)

Communautés d’agglomération :

  • Le transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » au 1er janvier 2020 est maintenu
  • À compter du 1er janvier 2020, il est ajouté aux compétences obligatoires des CA, la « gestion des eaux pluviales urbaines au sens de l’article L.2226-1 du CGCT ».

à Cette mention explicite « régularise » la position de la DGCL exprimée dans ses notes d’information du 13 juillet 2016 et du 18 septembre 2017 qui intégrait automatiquement dans la compétence « assainissement » tant les eaux usées que les eaux pluviales sans pour autant imposer l’exercice immédiat de cette compétence pour les CA actuellement compétentes pour le seul assainissement des eaux usées.

  • Le principe de la représentation-substitution « intégrale » est rétabli pour les compétences eau et assainissement (suppression de la condition du seuil de 3 EPCI à fiscalité propre).
    En revanche, contrairement aux CC, les CA conservent la possibilité de demander au préfet, après avis de la CDCI, de se retirer du syndicat avant le 1er janvier suivant la prise de compétence.

Communautés urbaines et métropoles

  • La gestion des eaux pluviales urbaines est ajoutée de façon explicite (et sans délai) au « bloc de compétences » assainissement et eau des CU et des métropoles désormais libellé « assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L.2224-8, gestion des eaux pluviales urbaines au sens de l’article L. 2226-1 et eau».

à Comme pour les CA, cette mention explicite « régularise » la position de la DGCL exprimée dans ses notes d’information du 13 juillet 2016 et du 18 septembre 2017 qui intégrait automatiquement et immédiatement dans la compétence « assainissement » tant les eaux usées que les eaux pluviales.

  • Les règles de représentation-substitution et de retrait des syndicats en cas de prise de compétence E ou A de la CU ou de la métropole demeurent inchangées : retrait automatique et immédiat si le syndicat ne regroupe pas des communes appartenant à au moins 3 EPCI-FP au moment du transfert de compétences E ou A à la CU ou la métropole. Si le syndicat regroupe des communes d’au moins 3 EPCI-FP, le principe de représentation substitution s’applique mais la CU ou Métropole conserve la possibilité de demander au préfet, après avis de la CDCI, de se retirer du syndicat avant le 1er janvier suivant la prise de compétence.

Conséquences pour les syndicats d’eau et/ou d’assainissement de la prise de compétence par un EPCI-FP

  • les Syndicats qui regroupent des communes membres d’au moins 2 communautés de communes subsistent après la prise de compétences de tout ou partie des EPCI-FP, le cas échéant sur un périmètre réduit en cas de demande de retrait au 1er janvier suivant la prise de compétence E ou A des CA, CU ou métropole, acceptée par le Préfet après avis de la CDCI.
  • Les syndicats qui ne regroupent que des communes membres d’une seule CC et de
    • une CA subsisteront sauf si la CA demande et obtient du préfet (toujours après avis de la CDCI) son retrait au 1er janvier suivant la prise de compétence E ou A ; dans ce cas, le syndicat sera automatiquement dissout au moment du retrait de la CA si la CC exerce déjà la compétence correspondante ou au moment de la prise de compétence par la CC si elle ne l’a pas déjà puisque le syndicat n’aura alors plus qu’un seul membre (il pourra toutefois subsister s’il exerce d’autres compétences non transférées à la CC)
    • une CU ou une métropole seront automatiquement dissouts au moment de la prise de compétence par la CU ou la métropole si la CC exerce déjà la compétence correspondante ou au moment de la prise de compétence par la CC si elle ne l’a pas déjà puisque le syndicat n’aura alors plus qu’un seul membre (il pourra toutefois subsister s’il exerce d’autres compétences non transférées à la CC)

Régies communes « eau, assainissement des eaux usées et gestion des eaux pluviales urbaines »

  • l’article L.1412-1 relatif à la gestion directe (régie) des SPIC est complété pour autoriser explicitement
    • les régies exerçant à la fois l’exploitation des services publics de l’assainissement des eaux usées et de la gestion des eaux pluviales urbaines,
    • et, dans le cas des régies intercommunales et sous réserve de les doter de la personnalité morale les régies exerçant à la fois l’exploitation des services publics de l’eau, de l’assainissement des eaux usées et de la gestion des eaux pluviales urbaines, sous réserve d’individualisation budgétaire des différents services publics.
  • Cette modification vise à « sécuriser » les régies Eau et Assainissement (EU ou EPl) existantes ou à venir alors que depuis quelques années (une réponse ministérielle de 2013) la DGCL et certaines préfectures ont contesté la possibilité pour les communes, EPCI et syndicats mixtes de constituer des « régies multi-services » et en particulier des régies d’eau et d’assainissement ; à cet effet, ils s’appuient sur une interprétation nouvelle de l’article L.1412-1 du CGCT : celui-ci disposant que « pour l’exploitation directe d’un SPIC relevant de leur compétence, constituent une régie (…) », ils en ont déduit que pour la gestion directe de 2 SPIC, il faut 2 régies etc. limitant ou à tout le moins complexifiant la possibilité de valoriser les mutualisations et synergies naturelles entre ces services et les économies d’échelle en résultant.

Le législateur (et le ministère en charge des collectivités) ont limité cette « sécurisation » des régies intercommunales des services publics de l’eau, de l’assainissement des eaux usées et de la gestion des eaux pluviales urbaines aux seules régies personnalisées. L’enjeu pour les régies dotées de la seule autonomie financière est moins prégnant dans la mesure où la réglementation prévoit déjà la possibilité d’un conseil d’exploitation et d’un directeur commun

Par ailleurs ils n’ont pas élargi cette « sécurisation » aux régies exploitant d’autres services publics car la proposition de loi ne concerne que les compétences Eau, eaux usées et eaux pluviales (cela aurait été rejeté comme étant un « cavalier législatif »). Toutefois l’élargissement reviendra de toute évidence en débat dans les mois qui viennent.

D’autres dispositions proposées au cours de la navette parlementaire (en général par le Sénat) n’ont finalement pas été adoptées dans le texte définitif :

  • Budget annexe : l’individualisation budgétaire ne demeure facultative que pour les services de distribution d’eau potable et d’assainissement gérés sous la forme d’une régie simple ou directe des communes de moins de 500 habitants à art L.2221-11 du CGCT inchangé.
  • Autonomie budgétaire : ne peuvent prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre des services publics de distribution d’eau et d’assainissement que les communes de moins de 3000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale dont aucune commune membre n’a plus de 3 000 habitants (le sénat avait proposé de remonter le seuil à 5 000 habitants) à art L.2224-2 du CGCT inchangé.
  • Pas de possibilité de reversement à la commune de toute ou partie des redevances perçues par le groupement intercommunal au titre de l’occupation du domaine public qui aurait été mis à disposition par la commune au titre du transfert de compétence (par exemple RODP payée par les opérateurs de téléphonie mobile au titre de l’implantation de leurs antennes et relais sur des châteaux d’eau)
  • Transfert des soldes budgétaires en cas de transfert de compétence : en première lecture, le Sénat avait proposé de rendre obligatoire le transfert à l’EPCI bénéficiaire du transfert de compétence « les soldes des budgets de fonctionnement tels que définis à l’article L. 2224-1 » ; en deuxième lecture, le Sénat avait proposé de s’en tenir à la possibilité de transférer par convention « le solde du compte administratif du budget annexe d’un service public dont l’exploitation est transférée audit établissement public. » Ces dispositions n’ont pas été adoptées. (Ceci dit, le « guide de l’intercommunalité » de la DGCL (chapitre 316-3) prévoit déjà que pour les seuls SPIC « il est admis que les résultats budgétaires du budget annexe communal, qu’il s’agisse d’excédents ou de déficits, peuvent être transférés en tout ou en partie [sous-entendu évident : au budget annexe du service concerné de l’intercommunalité]. Ce transfert doit donner lieu à délibérations concordantes de l’EPCI et de la (des) commune(s) concernée(s). (…)»).
  • Enfin les questions relatives à la maîtrise des eaux de ruissellement et aux interdépendances entre la gestion des eaux pluviales urbaine, la maîtrise des eaux de ruissellement et la protection contre les inondations seront traitées dans les mois qui viennent (en attente notamment du rapport du gouvernement au parlement mentionné à l’article 3 de la loi GEMAPI du 30 décembre 2017, de la 2ème séquence des assises de l’eau…).

Vous retrouverez nos analyses des différentes versions de ce texte, adoptées successivement par l’Assemblée nationale et le Sénat, sur le site internet de la FNCCR.

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