En 2015, le député des Hautes-Alpes, Joël GIRAUD, a remis au premier ministre un rapport sur la préservation des ressources en eau et le maintien d’une agriculture montagnarde dans lequel il propose, pour l’application du régime des débits réservés, de considérer les particularités hydrologiques des cours d’eau de montagne sèches. Sans modifier la définition du débit réservé figurant à l’article L214-18 du code de l’environnement, le député recommandait de classer le fonctionnement de ces cours d’eau méditerranéens comme atypiques afin de leur faire bénéficier d’un débit minimal réservé d’une valeur inférieure à celle fixée par la Loi.
Le projet de décret ci-joint, soumis à la consultation, introduit au R214-111 du code de l’environnement, un 4ème cas de cours d’eau dont le fonctionnement est reconnu comme atypique pour concilier les activités de prélèvement pour l’irrigation et l’Alimentation en eau potable sur ces cours d’eau méditerranéens et l’application du L.214-18. Ne sont visés que les cours d’eau dont le débit moyen mensuel sec annuel (QMNA) est inférieur au 1/10ème du module du cours d’eau.
Pour ces derniers, si le respect du 1/20ème du module n’est pas compatible avec l’activité (irrigation ou alimentation en eau potable) et si toutes les mesures d’économie d’eau techniquement et économiquement réalisables ont été mises en œuvre, la dérogation se limite:
– A la période d’étiage et sur trois mois,
– Au respect d’un débit plancher fixé au 1/40ème du module du cours d’eau
En outre, le Ministère de l’environnement se propose d’intégrer au projet de décret, une clarification de la notion d’obstacle à la continuité écologique, au regard de deux constats.
– d’une part ces éléments de définition figurent aujourd’hui à l’article R214-109 du code de l’environnement et s’appliquent aux ouvrages relevant du L214-17 (ouvrages longitudinaux ou transversaux situés en cours d’eau classés en liste 1) comme aux ouvrages (transversaux) relevant de la rubrique 3.1.1.0 du R214-1 (Installations, ouvrages, remblais et épis, dans le lit mineur d’un cours d’eau) indépendamment du classement du cours d’eau où ils se situent et quand bien même la rubrique fournit une définition de ce que constitue l’obstacle à la continuité (discontinuité de la ligne d’eau créée par l’ouvrage).
– d’autre part la décision du Conseil d’État N° 367116 du 11 décembre 2015 qui a conduit à l’’annulation partielle de la circulaire du 18 janvier 2013 relative à l’application des classements des cours d’eau en vue de leur préservation ou de la restauration de la continuité écologique (listes 1 et 2). Le juge avait conclu sur le fait qu’au regard des dispositions du L214-17 du code de l’environnement (qui conditionne la réalisation d’ouvrages sur les cours d’eau classés en listes 1), les demandes de construction de tout nouveau seuil et barrage ne pouvaient, sans instruction et analyse des services de l’Etat, être refusées au motif que ces ouvrages constituaient nécessairement des obstacles à la continuité écologique lorsque les projets portent sur un cours d’eau de liste 1.
Le Ministère propose donc
– de limiter l’application du R214-109 (définition de l’obstacle à la continuité écologique) aux seuls ouvrages situés en cours d’eau classés en liste 1 au titre du L214-17 (la définition de l’obstacle à la continuité figurant rubrique 3.1.1.0 restant applicable aux ouvrages relevant de cette rubrique)
– de détailler au R214-109, les cas permettant aux services instructeurs de juger qu’une demande d’autorisation portant sur un ouvrage en cours d’eau classé liste 1, peut être refusée parce qu’il présente un obstacle à la continuité écologique.
Constitueraient alors des obstacles à la continuité :
« 1° les seuils ou les barrages en lit mineur de cours d’eau atteignant ou dépassant le seuil d’autorisation du 2° de la rubrique 3.1.1.0 de la nomenclature annexée à l’article R. 214-1, et tout autre ouvrage qui perturbe significativement la libre circulation des espèces biologiques vers les zones indispensables à leur reproduction, leur croissance, leur alimentation ou leur abri, y compris en faisant disparaître ces zones ; [ces dispositions figurent dans la circulaire de 2013 et n’ont pas été contestées par le juge en Conseil d’Etat]
2° les ouvrages qui empêchent le bon déroulement du transport naturel des sédiments, et notamment ceux qui de ce fait impactent la formation et la régénération d’habitats diversifiés [cette disposition permet de considérer également les obstacles à l’érosion latérale des cours d’eau];
3° les ouvrages qui interrompent les connexions latérales, notamment avec les réservoirs biologiques, les frayères et les habitats des annexes hydrauliques ; [il s’agit dans cet alinéa d’élargir la notion de connexions latérales aux zones de frayères et habitats annexes hydrauliques, notamment pour les brochets]
4° les ouvrages qui affectent substantiellement l’hydrologie des cours d’eau, à savoir la quantité, la variabilité, la saisonnalité des débits et la vitesse des écoulements. C’est le cas notamment dès lors que :
– l’ouvrage conduit à la dérivation ou au prélèvement de 20 % du débit moyen du cours d’eau une majeure partie de l’année, y compris si ce débit est remis en totalité au cours d’eau en un point aval,
– ou l’ouvrage ennoie des habitats en créant une retenue ou les met hors d’eau,
– ou l’hydrologie ne permet plus d’assurer le bon déroulement du transport des sédiments. »
[Le ministère souhaite clarifier la notion d’une modification substantielle de l’hydrologie en la limitant aux gros prélèvements mais en élargissant sa portée aux trois critères de classements des cours d’eau, la réserve biologique mais également la protection des migrateurs amphihalins et l’atteinte du très bon état écologique].
Enfin ce même article comportera une précision permettant à l’avenir de considérer dans quelle cas un ouvrage relève de la reconstruction ou d’une nouvelle construction (notamment les ouvrages abandonnées sur lesquels la continuité écologique s’est naturellement quasi entièrement restaurée).
Je vous remercie de me faire part de vos observations avant le 18 janvier 2017 à Dominique BAPTISTE (d.baptiste@fnccr.asso.fr )