Évaluation des actions financières du programme Écophyto

À la suite du référé* du 27 novembre 2019 de la Cour des comptes pointant notamment la faiblesse des résultats du plan Écophyto au regard des sommes investies et les difficultés de la gouvernance et de gestion, le gouvernement a commandé une mission d’évaluation de leurs actions financières aux Conseils généraux de l’environnement et du développement durable (CGEDD) de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et l’Inspection générale des finances (IGF). Le rapport a été remis au gouvernement en mars 2021 mais n’a été accessibles qu’en mars 2022 à l’initiative de France Nature Environnement.

Le rapport confirme les constats de la Cour des comptes mais va plus loin (208 pages au lieu de 6…) en pointant que les principaux objectifs et actions du plan n’ont jusqu’alors été ni évalués ni fait la preuve de leur efficacité (communication, animation, promotion des bonnes pratiques visant la diffusion par l’exemple avec le « regard par-dessus la haie »…). En particulier, rapport note que « si le plan a démontré qu’une réduction de l’usage des PPP est possible et, dans certaines conditions, compatible avec le maintien du revenu agricole, aucune des actions menées jusqu’à présent dans le cadre du plan, et a fortiori de son programme national, ne semble susceptible d’entraîner la massification de ces démarches de substitution aux PPP, à l’exception du développement de l’agriculture biologique. ». Il souligne également que malgré des ressources mobilisées significatives (643 M€ en 2019), elles « ne peuvent à elles seules contrebalancer certaines orientations des politiques agricoles nationales et européennes. »

La mission formule ainsi plusieurs « recommandations pour améliorer la gouvernance, le processus de programmation, le choix des indicateurs, la mise en œuvre du programme et l’évaluation des actions soutenues » et ainsi que de « définir une nouvelle trajectoire à dix ans de réduction des PPP cohérente avec la nouvelle politique agricole commune (PAC) et l’ensemble des politiques conduites aux plans européen et national, et incluant un dispositif de massification » via 3 propositions de scénarios, dits :

  • « segmentation » qui « vise à soutenir en priorité les acteurs et les filières volontaires et engagés collectivement, comme c’est le cas pour l’agriculture biologique » mais nécessite de mieux différencier les produits concernés jusqu’aux consommateurs et « une priorisation claire des politiques publiques, notamment de la fiscalité et des régimes d’aides. »
  • « incitation » à l’adoption des « bonnes pratiques » vis « les signaux de marché (taxation et aides financières aux bonnes pratiques) », qui nécessité « le renchérissement progressif, mais important du prix relatif des PPP par rapport à leurs substitutions » et « la rénovation du conseil agricole, stratégique et pas exclusivement relatif aux PPP »
  • « réglementation & PAC » qui « repose sur une prise de responsabilité plus grande de l’État, justifiée par des études précises sur les dangers et les risques de l’utilisation des PPP pour la santé humaine et la biodiversité. Le durcissement de la réglementation est accompagné d’un alignement des politiques publiques, et notamment d’une augmentation forte des conditionnalités de la distribution des aides de la politique agricole commune, et d’un contrôle effectif des pratiques. Ce scénario est le plus puissant mais il ne peut être mis en œuvre, sans danger pour la compétitivité de l’agriculture française, qu’avec une forte harmonisation européenne et une exigence identique à l’égard des importations, ce qui impose d’en faire une priorité de la politique commerciale de l’Union européenne. »

La mission soulignait que « le nouveau plan devrait débuter avec la nouvelle PAC en 2023: cela laisse le temps pour compléter l’évaluation des actions soutenues et des leviers utilisés, ainsi que pour mesurer l’ambition commune avec nos partenaires européens, concerter les modalités avec les parties prenantes et veiller à utiliser au mieux les marges de manœuvre que la nouvelle PAC autorisera pour en faire un levier majeur de la réduction de l’usage des PPP. »

Voir le rapport Évaluation des actions financières du programme Écophyto, CGEDD, CGAAER, IGF, mars 2021

* un référé est une « communication adressée par le Premier président de la Cour des comptes à un ministre pour lui faire part des observations formulées par la Cour à l’issue d’un contrôle. »

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